Thursday, January 25, 2007

ton string est orphelin

posté par Cyril Vettorato @ 12:30 AM 0 comments



Disco D, le Dr Dre de la musique pour fesses, ne fera plus retentir le son ghettotech dans le hip hop mainstream. Il s'est suicidé dans la nuit de lundi à mardi, sans doute rongé par la culpabilité après avoir produit des sons pour l'infâme Kevin Federline.
D'où ce phénomène assez fascinant : des tas de e-gens qui lui "lâchent des comms" sur son myspace, comme s'il surfait depuis l'au-delà et se réjouissait d'avoir autant de friends. Quoi qu'il en soit, il faudrait que quelqu'un pense à changer rapidement cette phrase restée en haut de sa page : "D’s future is bright and busy".


Wednesday, January 24, 2007

Wooster collective

posté par NNMS @ 12:08 AM 1 comments


Tuesday, January 23, 2007

Un petit air de bal musette...

posté par nemanja @ 2:38 PM 1 comments


En fait, je voulais parler de l’utilisation de l’accordéon dans le rap. Et puis je me suis rendu compte qu’à ma connaissance dernièrement deux morceaux qui utilisaient de l’accordéon ont été produit par les Neptunes puisqu’il s’agit de « I’m a G » par Nore et Pharell, et dernièrement « Momma i’m sorry » sur l’album de Clipse. Si le premier morceau a une petite touche bal musette, le second pousse l’accordéon dans ses derniers retranchements en en faisant un instrument d’une modernité rare, jouant sur les basses et les aigus. Une bonne transition pour parler de The Clipse, le groupe américain au style européen, une sorte de dandysme à la française, puisqu’on ne cesse d’encenser la France – à tort ou à raison – pour son exception culturelle. Sur le morceau « Momma i’m sorry », Clipse est au summum de son art européen. Dès le premier couplet, Pusha T se revendique de la culture philosophique hellénique :

“I philosiphies about glocks and keys
Niggas call me young black Socrates”

Puis au refrain, cette utilisation d’un vocable du langage anglais soutenu, « obnoxious », associé à l’amour de la mère, que l’on retrouve notamment dans la culture chrétienne occidentale (inutile de citer la longue liste des œuvres faisant l’éloge de la mère dans notre culture).
Petite définition :
Etymology: Latin obnoxius, from ob in the way of, exposed to + noxa harm -
1 archaic : exposed to something unpleasant or harmful -- used with to
2 archaic : deserving of censure
3 : odiously or disgustingly objectionable : highly offensive

Le deuxième couplet par Malice est tout entier une ode à la culture européenne. D’ailleurs, ceux qui s’amusent à lire les paroles sur OHHLA par exemple, verront l’incapacité culturelle à retranscrire toutes les références du texte. Après une courte hésitation, voici comment est retranscrit le couplet sur OHHLA :
( http://www.ohhla.com/anonymous/clipse/hellhath/so_sorry.clp.txt )

“From Frankford to Colon… Oslo to Sweden
From Italy's Milan to the shores of Nepali
Now I consider Ferrarian Salvador dollies
I'm no longer local, my thoughts are global
Thats why I seen distance, son expand ya vision
Even adored by Norwegian woman, blonde hair and blue eyes”

Ce couplet, le voici, sans faute :

“From Frankfurt to Cologne… Oslo to Sweden
From Italy's Milan to the shores of Napoli
Now I consider Ferrari and Salvador Dali
I'm no longer local, my thoughts are global
That’s why I seen distance, son expand ya vision
Even adored by Norwegian woman, blonde hair and blue eyes
I'm gettin back with a vengeance
Whip it like they want me all attached to the kitten
And they wonder in these raps if I'm kiddin...huh..”

Ce petit tour d’Europe - sûrement une réminiscence d’une tournée européenne – autant géographique que culturelle (Salvador Dali), se termine par la référence assez étrange à la femme norvégienne, très aryenne, puisque blonde aux yeux bleus. Cette volonté d’entrer dans le monde de la culture, de s’y ancrer, est manifeste dès lors que les deux mc’s théorisent leur art, ici en nommant leur texte comme étant de la Ghetto literature, mais surtout dans le morceau « Hello New World », dans lequel Pusha T redéfinit avec justesse sa poésie :

“See, I was 16, eyes full of hope
Bagging up grams at the higher dough
The news called it crack, I called it Diet Coke (Ohhh!)
At the same time, hiding from mama, dodging the drama
Fuckin plenty bitches while ducking the baby mama
I found poetry, excuse me, Floetry

Et ce terme-là, qu’il est, à mon avis, le premier à utiliser, définit sans équivoque la différence de poids entre la poésie – en perte de vitesse, qui se meurt dans la littérature suffocante de ce début de millénaire – et la post-modernité (je n’aime pas ce terme) du Hip Hop, la différence c’est le flow. Car ne dit-on pas, avec Céline, et énormément d’autres écrivains modernes du XXème siècle, que ce qui fait que la littérature vit encore, c’est le STYLE, et quel est le seul art qui privilégie cette forme, si ce n’est le rap. Quel est le seul art qui depuis Ghérassim Lucas ose jouer avec la voix, jusqu’à utiliser le bégaiement comme un style (je pense ici à quelque passage du dernier album de Booba, Ouest Side, notamment le refrain du Duc de Boulogne, qui ainsi créé des néologismes intéressants).
Si bien sûr, il y a ailleurs une référence à la Floetry, autre que le nom de cette chanteuse r’n’b britannique, je suis preneur.

Pour conclure sur ce trou d’air d’accordéon déplié, je citerai un autre théoricien du flow, Illa Ghee, camarade de Prodigy de Mobb deep, qui sur le morceau obscur « See you cry » dit au passage :

« just don’t rhyme, I spit the ocean. »


la france en pleine gueule

posté par Cyril Vettorato @ 2:18 AM 2 comments


De retour au pays de K-Maro pour un bref séjour de plaisance, je ne compte pas vous infliger les litanies tant attendues sur les fameuses "différences culturelles" - sujet de conversation préféré des gens un peu faibles d'esprit, mais néanmoins très pratique quand il faut discuter avec des personnes à qui on n'a rien à dire. Ce qui me fait penser à la première chose entendue une fois mes pieds posés sur le sol français : un couple d'Américains qui avaient fait le trajet dans le même avion, debouts sur le tapis roulant juste devant moi, observent un bref instant les gens qui marchent comme nous en direction du guichet où les passeports sont contrôlés ; après environ dix secondes, le mâle prend un air mi intéressé mi sévère et s'écrie "les différences culturelles sont énormes ! c'est totalement autre chose !"

Rien de tel dans mes impressions de retour au pays natal, pas de stupéfaction transnationale ou de phénomène de désaccoutumance / réaccoutumance... jusqu’à ce que j’allume MTV pour une bonne vieille séance clips. Là, je dois avouer qu’à la façon d’un Borat à télécommande, je me suis pris en pleine gueule l’esthétique « hip hop français », une des seules choses dans ce pays qui ne traverse vraiment jamais l’Atlantique. A New York, la moindre daube cinématographique française est consacrée film culte, et les battles royales entre Royal et Sarko font un excellent sujet de conversation entre gens éduqués ; mais tout ça, par contre, c’est 100% exclusivité hexagonale :

Shy’m - victoire

Kamini - marly gomont

Medhy custos - Elles demandent

Vitaa - à fleur de toi


Je remercie donc MTV France pour m’avoir donné mon seul authentique « choc des cultures ». Et dire que certains voient dans cette chaîne un vecteur de l’américanisation de notre culture nationale.

P.S. : tout ça me fait repenser à une conversation assez marrante que j’ai eue avec une meuf pimpante à Harlem, probable mytho qui prétendait sortir avec un proche collaborateur de Jay-Z et fréquenter tout le gratin du hip hop new yorkais. Après avoir discuté rap pendant une demi heure, il me vient l’idée étrange d’évoquer le hip hop français. La meuf éclate alors de rire comme si je venais de lui dire la chose la plus folle qu’elle ait jamais entendue, et une fois son hilarité calmée, me demande comme pour vérifier que je ne plaisantais pas : « You REALLY have such a thing ??? » Je pouvais voir dans ses yeux la collision brutale de deux concepts inconciliables, le français chétif à lunettes et béret qui sirote des vins raffinés dans des villes sous développées, et le rappeur ricain qui verse du Cristal sur des seins en plastique (dont les siens, probablement). Et d’ajouter : « Do you... do you even have people of color back there ?? » Chère meuf-qui-fait-partie-du-milieu, si tu lis ce post et que tu te reconnais, clique sur les liens ci-dessus et prends ça dans ta face.
P.S.2 : K-Maro est Québécois, en fait.

Monday, January 22, 2007

Un peu d'air frais

posté par NNMS @ 3:13 PM 2 comments


Etant aux 3/4 paranoïaques et pour 1/4 lucides, il n’a pas échappé à l’équipe de Weak Tactics que dans les recoins les plus sombres d’Internet les langues se délient et le fiel se déverse par torrents au sujet de notre blog. Trop de blabla, trop de plagiat, trop de théories fumeuses, trop de texte dans les posts, il serait sage pour nous de nous renouveler et de partir sur des bases saines.

Un grand « allez vous faire foutre » à tous ceux-là. Persévérant dans nos tactiques bancales et notre crédibilité factice, c’est avec fierté que nous accueillons à partir d’aujourd’hui, et pour la première fois, un invité sur ces pages : Nemanja de Keep It Fake. Pendant une paire de semaines il nous gratifiera de quelques posts. Petite présentation de l’interessé, pour commencer :

Il n’est jamais évident de se présenter. On a tendance à faire des sommes, à se soustraire à l’exercice, et puis finalement seule la facilité nous permet d’exister. Je ne suis qu’un semi-gangster, encore une entité mathématique, une moitié, une division… Seulement, sans aucune technique particulière, mis à part celles que la vie a bien voulu faire de l’expérience subie car subite ; un peu serbe, seulement de trois doigts de chaque main, à quoi peuvent bien servir les deux autres ? un peu littéraire, de bac + 5 (je ne connais pas le résultat de cette somme-ci) ; pas très tic, plutôt ironique, salement critique, sans frontières bien précises, je suis un état, entre le lamentable et le revolver qui me sert de coussin. Quand je rêve, j’appuie sur la gâchette, ça ne me réveille pas, mais le coussin devient plus léger, tout comme mon sommeil. Car un revolver avec une balle en moins, c’est un jeu en devenir, une roulette russe qui s’annonce, un conflit qu’on altère, un mec schizophrène qui n’a pas d’autres moyens que de déblatérer ici et là, sous peine de se tuer, il écrit sur les fruits, sur les fakes, et maintenant avec des semi-gangsters. Deux demi-gangsters, ça na jamais fait un gangster, mais ça fait déjà un gang. Alors sortez vos coussins de vos culs. Je ne le ferai pas pour vous.

Mikah 9 - Live @ Cassiopeia, Berlin, 18.01.07

posté par NNMS @ 9:07 AM 1 comments

A l'époque, le journalisme gonzo était cool, audacieux, psychédélique, provocateur, à l'image des rêves de libération qui animaient la jeunesse. Raconter l'expérience vécue plutôt que la version officielle d'un évènement, c'était mettre en valeur la vie réelle plutôt que les institutions. Aujourd'hui on a bien retenu que le monde officiel est une illusion sans valeur, mais la vraie vie est devenue lo-fi, losée, lyophilisée (cette formule un peu naze n'est bien sûr la que pour illustrer le passage de Hunter Thompson à la prose Inrocks).

Voilà donc à quoi pourrait ressembler le journalisme gonzo d'aujourd'hui.

18 janvier, le préavis de tempête s'est répandu comme une onde de choc sur la ville de Berlin. Partout dans la capitale, les gens frissonnent, pas tant de froid que d'anxiété devant les rumeurs : vents de 250 km/h, 8 morts lors de la dernière tempête... Comme l'a expliqué Baudrillard, les médias sont désormais plus réels que la réalité elle-même : sans l'hystérie collective, j'aurais sans doute à peine fait attention au vent un peu fort qui ralentissait mes pas. N'empêche, sur le chemin du Cassiopeia, je me sens l'âme d'un jeune romantique allemand qui brave les éléments pour aller voir les passions se déchaîner sur scène dans un jeu de miroir avec l'eau, l'air, et le feu des éclairs qui illuminent la ville.


Bon, et bien ce ne sont pas les 30 personnes dans le hall qui viendront confirmer cet élan d'impétuosité. Les habituels dreadeux aggro berlin (dédicace à MfDoob !), les trois jolies breakdanseuses et, noté-je avec plaisir, plus de freaks que d'habitude. L'une de ces difformités qui font tout le charme de Berlin vient me parler, elle est suisse, son hoodie rouge couvre mal sa moustache et surtout elle cherche de la weed. Tout comme la demi-douzaine d'autres individus qui m'accostent. Finalement, je sympathise avec Steve (ou Bob ou Kevin, peu importe), un californien en sweat Hieroglyphics et nous allons ensemble regarder le début du show de Mykah.

Pour ceux qui ne connaissent pas le bonhomme, Mikah 9 de Freestyle Fellowship est un des types qui a révolutionné l'art de l'improvisation rappée au début des 90s. Et en effet le type rappe comme un dieu : flow à 10000 à l'heure sans effort, syncopes imprévues en-veux-tu-en-voila, paroles souvent bien vues et toujours cohérentes, et le truc en plus, un phrasé mélodique qui se rapproche de solos de jazz. Et que dire de plus ? Sans doute des idées et des observations plus fines et précises, si mon compère américain ne s'était pas mis en tête de me faire partager ses six grammes d'herbe en l'espace d'une heure. Les joints sont déjà roulés, et il a à peine le temps de me dire de les finir qu'il en allume un autre jusqu'à ce que mon cerveau aille aussi lentement que Photoshop sur PC et que mes mains suivent moins le rythme que je ne suis la campagne des présidentielles 2007.


Manque d'intérêt pour la politique, la drogue pour s'assommer et pas pour s'éveiller, les promesses d'exaltation qui finissent sous deux minutes d'applaudissements d'un public aussi chaud qu'août 2006. La preuve est faite, ce n'est pas pour rien que notre époque s'écrit en SMS et en skyblogging plutôt qu'en gonzo journalisme.

Wednesday, January 17, 2007

Soldes

posté par NNMS @ 4:38 AM 0 comments


Pour nos lecteurs de Paris, Cologne, New York et L.A. : les éditions TASCHEN vident leurs stocks. Leurs entrepôts dans ces quatre villes proposeront, du 18 au 20 janvier, des rabais de 50 à 75% ce qui peut valoir le coup.

[Lien] http://www.taschen.com/pages/en/events/index.htm?title=warehouse

Tuesday, January 16, 2007

The Sure Shot

posté par Cyril Vettorato @ 10:32 PM 3 comments

Depuis quelques années aux Etats-Unis, l’étiquette "hip-hop" ne se contente plus de faire vendre des millions de disques : elle ramène vers des domaine réputés élitistes une jeunesse qui les désertait. Dans les années 2000, le grand public se rue en masse dans des théâtres pour aller écouter de la poésie, permettant au fondateur de Def Jam Russell Simmons d’exporter son émission-vedette "Def Poetry Jam" jusque sur les planches de Broadway. On fait de Staceyann Chin ou de Suheir Hammad des poètes stars - oui, mais ce sont des "poètes hip-hop"; l’exposition d’art contemporain "hip-hop" du musée du Bronx "One Planet Under a Groove" a été un événement immense dans le borough, attirant un public peu habitué au musée. Profitant de cette tendance, Jeff Chang se permet dans son nouveau livre une approche du mouvement plus novatrice que dans son classique Can’t Stop Won’t Stop. Comme son nom l’indique, Total Chaos - sous-titré The Art and Aesthetics of Hip-Hop - est un volume totalement excentrique, qui part dans tous les sens, ouvre des perspectives multiples sans se soucier de leur viabilité et élargit les possibilités du discours critique jusqu’au point de rupture. L’une de ses idées directrices est que toutes les dimensions créatives de la société existeraient à la sauce hip-hop : outre les "4 éléments" généralement évoqués, on aurait une littérature hip hop, une photographie hip hop, un art hip hop, un théâtre hip hop, et ainsi de suite. Sans vouloir remettre en cause la qualité du livre, je pense que forger comme le fait l’auteur-éditeur des tas d’expressions comme "hip-hop photography" comme si elles allaient de soi n’a pas grand sens.


Je voudrais en profiter pour m’arrêter justement sur cet exemple et parler un peu de la photographie et de son rapport au hip-hop. Le mouvement étant caractérisé par le rôle majeur de l’imagerie, qui véhicule ses valeurs - à l’instar d’autres courants comme le punk ou le métal - les photographes y ont forcément joué un rôle à la fois de témoins et de créateurs. La dimension sociale du mouvement a par ailleurs redoublé cet aspect pop d’un autre plus naturaliste. Le photographe hip-hip ne fait pas autre chose que n’importe quel photographe : il observe et enregistre le monde qui l’entoure, tout en participant par ses clichés au façonnement de modèles et de modes. Il n’y a pas d’esthétique spécifique à cette photographie, contrairement à la musique rap ou au break. À partir de 1980 environ, les photographes se tournent vers les différents signes visuels de la culture, que ce soient les graffs qui foisonnent sur les murailles urbaines ou les trouvailles vestimentaires excentriques de b-boys. Mais la figure de proue du mouvement, son incarnation mythique, c’est avant tout le rappeur ; et les grands noms de la photographie hip-hop sont presque tous des portraitistes doués, qui sont parvenus à donner une dimension "plus-grand-que-nature" à des stars du mic - à les faire passer à la postérité en créant des icônes particulièrement emblématiques. C’est assez évident si on observe des clichés des maîtres du genre, aujourd’hui consacrés : Jonathan Mannion, Chi Modu, Carl Posey, Josh Cheuse, ou dans un style un peu différent Janette Beckman.

Leurs techniques n’ont rien de particulier, mais elles sont employées de façon à mettre en avant les symboles de la culture et à faire passer le rappeur dans une dimension supérieure, à en faire une icône. Au premier coup d’œil, on peut avoir l’impression que toutes ces photos sont identiques et qu’elles se contentent d’accumuler les objets-types du hip-hop - bijoux, t-shirts extra-larges, etc - associés à des postures conventionnelles. Mais une bonne photo justement fait un usage spécial de ces symboles et de ces conventions pour montrer la " personnalité " associée au rappeur, son art et son message. C’est un type de photo pop qui doit montrer toutes les ambiguïtés de la figure du rappeur, à la fois frimeur et intime, conscient et nihiliste.

Le premier, comme il se doit, est le rappeur ayant acquis le plus sûrement un statut de mythe, à savoir Tupac Shakur - photographié ici par Chi Modu. L’intérêt de ce portrait est justement qu’on ne voit pas le visage du M.C., et que sa posture de dos nous invite à l’identifier par ses seuls attributs. Le look " thug life " apparaît dans de nombreux éléments, et Pac avec son bandana n’a pas besoin de nous faire face pour qu’on le reconnaisse, ce qui scelle sa dimension de véritable légende. Il nous défie en nous donnant le middle-finger bien haut, de façon emblématique de la thug attitude ; mais on peut voir qu’il nous invite à regarder ses tatouages, comme si on pouvait en apprendre plus sur lui à travers eux qu’en le voyant de face. Cette photo est à la fois agressive, arrogante et intime, et en cela elle rend assez bien compte de la dualité de la figure du rappeur. C’est aussi le cas de la photo suivante.



Dans ce cliché de Slick Rick par Janette Beckman, le bling-bling est poussé à l’extrême, d’autant plus qu’il est mis en valeur par le lumière. Le fond est noir, et le visage de Rick est à moitié dans l’obscurité - tandis que l’autre moitié est cachée par son bandeau de pirate. La seule partie de son faciès qui est bien visible est le sourire insolent du pimp. Il y a à la fois dans ce cliché l’attitude provocatrice de l’auteur de " Behind bars " et le côté outré et parodique de ses premiers albums. Mais surtout, son sourire et sa posture un peu forcés donnent un peu l’impression d’un gamin qui jouerait maladroitement avec un déguisement. On peut lire la photo à la fois comme une mise en scène de l’imagerie du mouvement, et comme un portrait presque intime du rappeur le plus misogyne de l’histoire.


Ce portrait de Busta Rhymes par Jonathan Mannion est assez connu, à tel point qu’il est fortement associé aujourd’hui avec l’image du rappeur new yorkais. On retrouve les fameux symboles du hip-hop et de ses valeurs ; la stature et la posture de Busta, en plus de ses tatouages, témoignent de l’importance de la masculinité dans l’image idéalisée du rappeur. Mais l’effet " avant-après " nous donne l’impression de partager avec lui une expérience importante de sa vie personnelle, celle de couper ses rastas. Comme dans les deux précédentes, cette photo mythifie le M.C., image d’autorité et de classe, tout en gardant un côté intime. La moue de Busta peut sembler à la fois détachée et nonchalante comme on l’attend d’un rappeur, mais aussi un peu décalée. Le fait de se couper les rastas est symbolique : d’origine jamaïcaine, Busta a commencer par produire un rap mêlé de reggae, avant d’évoluer vers un hip-hop plus orthodoxe. Les locks étaient un peu sa marque de fabrique : la photo-document traduit une évolution personnelle, intime et artistique, de façon humoristique.

En plus de cette dimension personnelle qui met en scène le rôle endossé par le rappeur de façon légèrement critique, le portrait de rappeur montre le statut qui lui est prêté dans le mouvement, incarnant par l’image la culture hip-hop de façon plus large et ses évolutions. Dans ce portrait de Bambaataa, Janette Beckman a parfaitement su traduire la place particulière du fondateur due la Zulu Nation. Le look discret du M.C. associé au cadre ramènent à la fonction sociale du mouvement à ses origines. Le ghettoblaster est bien un symbole de cette culture, mais la manière dont il s’insère dans cette photo est très symbolique : il dénote la façon dont la musique peut apporter un message positif aux jeunes tentés par les gangs. Ce n’est pas l’esthétique flamboyante du hip-hop qui est évoquée ici : les tags qui recouvrent le mur de fond sont tout ce qu’il y a de plus quelconque et antiflashy, et le ghettoblaster ferait presque pitié. La posture de Bambaataa, accroupi et fixant l’objectif d’un air pénétré comme pour interpeller le spectateur de façon intimiste, renvoie aussi ce message social des débuts.


Rien à voir avec les ghettoblasters de Big Boi, d’un tout autre calibre, dans un portrait d’une toute autre classe signé par Jonathan Mannion. Comme dans l’image précédente, le portraitiste a associé l’artiste musical à un objet qui représente la musique - plusieurs même, les enceintes et les caisses de vinyles. Mais ces objets ont une fonction visuelle avant tout, avec la structure immense de hauts-parleurs qui relègue l’artiste à l’arrière fond, comme s’il maîtrisait la musique avec classe tout en se mettant en retrait. Le design de la photo rend bien le style d’Outkast, surtout à l’époque Speakerboxx, qui associe un son sudiste brut à une certaine sophistication. Cet artwork original et très travaillé nous amène à des années lumières de ce que traduisait le portrait de Bambaataa avec le même attribut symbolique. C’est la culture hip-hop qui apparaît symboliquement dans le portrait de ses acteurs, de ceux qui l’incarnent et la font évoluer.


Un ghettoblaster apparaît encore dans cette photo de Josh Cheuse qui met en scène Schooly D. L’intérêt de ce portrait est le rôle du décor : une maison en ruines de Belfast a remplacé l’habituel enfer urbain, ce qui symbolise la capacité du hip hop à s’exporter partout dans le monde dans des contextes différents. L’énorme appareil audio et le style des b-boys détonnent dans ce cadre, mais en même temps l’aspect du bâtiment fait écho à l’état des quartiers noirs où est née la musique rap ainsi que beaucoup de ses acteurs. La contre-plongée rend assez réussi l’effet de frime et à la fois de mise en scène du décor dévasté - représentant bien le hip-hop et ses deux tendances. De façon très bizarre, en rapprochant la situation historique des minorités aux Etats-Unis à celle de Belfast, la photo met en scène les symboles du hip-hop pour représenter pertinemment l’artiste et son art.



Dans tous les portraits précédents, les rappeurs gardaient malgré l’originalité de chaque photo une posture emblématique du hip-hop. Face à l’objectif, sûrs d’eux - à l’exception de Tupac qui retournait (no pun intended) cette convention. Les portraits de Carl Posey, très connus eux aussi, témoignent d’une évolution récente vers une certaine sophistication, une mise à distance des canons du style. La photo hip-hop n’a plus peur d’être arty.

Ce portrait de GZA substitue à la posture de défi une position d’attente, bras ballants, détaché de tout. Le regard du Genius ne toise pas le spectateur, il semble vaguer comme au cours d’une méditation. Ce portrait en noir et blanc traduit parfaitement la dimension mystique et spirituelle du hip-hop pratiqué par le Wu-Tang, qui fait référence aux arts martiaux à longueur de morceaux. Là où le M.C. affiche souvent une extériorité fondamentale, par ses accessoires et la manière dont il agit constamment sur son environnement, interpelle, provoque, GZA apparaît tout en intériorité. La construction de la photo en diptyque, qui agrandit la moitié du visage, sert aussi à cela : le regard impassible y est particulièrement frappant. Le demi-visage, ajouté au chromatisme noir et blanc très marqué, fait penser au symbole du ying yang.


Cet autre montage-photo de Carl Posey va encore plus loin dans l’inventivité par rapport aux conventions du portrait de rappeur. L’image est composée de deux photos qui ressemblent à des scènes de vie stylisées dans les suburbs - les Youngbloodz qui dansent n’importe comment en se marrant font penser à des gamins qui jouent ; et ce bon vieux Method Man qui pisse dans les buissons en faisant une tête marrante. On peut inventer des relations narratives entre les deux parties de la photo : peut-être que les deux jeunots se marrent potachement parce qu’ils ont vu Method Man. En tout cas, chaque image fait référence de façon ironique au nom de scène des rappeurs représentés : les Young Bloodz font les gamins en référence au mot "Young" et Method Man est entouré de feuilles qui rappellent son pseudonyme ("Method" signifie la beuh en argot).


À côté de cet art du portrait qui peut prendre toutes sortes de formes - il n’y a pas de recette spéciale pour faire une photo qui deviendra classique - on peut aussi trouver une photo hip-hop plus documentaire, qui s’attache aux anonymes incarnant le lifestyle propre au mouvement. Je ne vais pas m’étendre là-dessus, mais voici quand-même un exemple célèbre, une des photos de la série " Hip Hop Project " de Nikki Lee. L’image en soi documente l’idéologie sexuelle du hip-hop mainstream : les hommes regardent fièrement l’objectif tandis que les femmes qui sont exhibées sur leurs genoux en signe de puissance regardent hors-champ - l’effet visuel de cette organisation de la photo est assez troublant. Mais c’est une autre histoire, et ce post n’a déjà que trop duré.

Thursday, January 11, 2007

r.kelly en plastique à l'échelle 1

posté par badpetersal @ 4:28 AM 0 comments


Wednesday, January 10, 2007

"UN MYSPACE BIEN SOUS TOUS RAPPORTS"

posté par badpetersal @ 8:19 AM 0 comments

Entre le 30 octobre et 12 décembre 2006 cinq prostituées sont assassinées à Ipswich. Cette série d’assassinats, inédite depuis 25 ans en Grande Bretagne, émeut et passionne tout de suite l’opinion publique. Les médias en font des tonnes : on compare l’assassin à Jack l’éventreur, on le surnomme «l’Etrangleur du Suffolk ». La police interpelle un premier suspect le 18 décembre : Tom Stephens.

L’homme de 37 ans avait un myspace ; aujourd’hui sa page a été supprimée.

Au moment de l’arrestation, l’adresse myspace est diffusée à grands pas sur le net ; la plupart des articles qui traitent de l’affaire mentionnent l’existence de la page web perso de Tom Stephens. Comme si cette révélation pouvait constituer une pièce à conviction, un support riche à décomposer et décrypter. Un emplacement déclencheur de suppositions et de fantasmes, destiné à tout le monde.
Une fois le myspace de Tom Stephens rendu inaccessible : les journaux se chargent de décrire le myspace du meurtrier présumé. La description du Guardian reste clinique , peut être conceptuelle ( en référence aux tautologies de josef Kosuth) ; l’idée du myspace « bien sous tout rapport » - mais-blindé-d’évidences est quand même sous entendue.

Les informations disséminées sont quelquefois déprimantes ; elles frôlent l’inintéressant, le prosaïque, voire le ridicule :

« The grainy main photograph on the 37-year-old's profile on the top social networking website shows him smiling and wearing a fishing hat. He has eight people listed in his "friends space".

Clicking on the photographs section reveals six images of Mr Stephens, including one in which he is holding up a can of custard and another in which he appears to be wearing eyeshadow.

There are also lots of images of the 1970s cartoon character Hong Kong Phooey, who Mr Stephens describes as "my hero!".

he says he does not watch television "very often". »

Ridicule surtout lorsque le seul intervenant de la page myspace de Tom Stephens fait une apparition :

« Only one of his MySpace contacts, Sebastian, of Merseburg, Germany, has left a message on Mr Stephens's page. Sebastian writes: "Heya Tom crazy football guy, greets from Germany." »

Quelques phrases sont censées dégager des traits psychologisants du myspaceur :

« On the section about whether he has or wishes to have children he says he "loves kids but [they are] not for me" .

In the companies section, he says he is a "team leader" and has worked for Tesco "from 1997 until they sack me".

Where he is asked to describe his favourite film he jokes "sorry I haven't starred in any". »

On note pas mal d’informations du guardian qui tendent à prouver le caractère ambigu, énigmatique du myspace de Tom Stephens ; laissant par ci par là des inquiétudes et installant des atmosphères de danger :

« He has a profile on the MySpace website in which he calls himself "The Bishop".

Playing in the background when you open his profile page is a classical piece of music, Canon in D Major by Johann Pachelbel.

He describes himself as straight, single and says he is using the site for "dating, serious relationships, [and] friends".

Mr Stephens says he is "athletic" and his interests are most types of "keeping fit", and going on days and nights out. »

Photographie de Tom stephens sur sa page myspace


Le lendemain de l’arrestation de Tom Stephens : un autre suspect considéré comme plus sérieux est interpellé. Le détenteur du myspace est écarté de l’affaire.

Reste une bouffonnerie : la description innoncente d’un myspace parmi plein d’autres - dommage que le description du guardian soit si superficielle - et l’exercice confirme encore l’idée que myspace est inopérant et ennuyeux.



Sunday, January 07, 2007

pour enterrer définitivement 2006

posté par Cyril Vettorato @ 7:52 AM 0 comments

T.I le roi, Rihanna, Ciara, Ne-Yo, Dre, Dro, Ghost, Cham, Cam', Crash, Nas, Yung Joc Shouuulder Leanin', some more Justin fussin, Timba, Luda, Busta, Jay-Z ou pas, B, James Brown R.I.P., Chris Brown, Young Jeezy, Kanye, Lupe, Gnarls Barkley, Clipse, stay fly like Three Six and fly high like this Jim Jones dipshit, Game, Wayne, trop de mauvais Neptunes dans cette merde, et surtout James Brown R.I.P.
And now for something completely different.

Wednesday, January 03, 2007

schönes jahr évidemment

posté par badpetersal @ 7:39 AM 0 comments



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